Busted [PV Jordan]

Vêtue d'une courte jupe bleue sombre, d'une chemise blanche et d'un gilet assortit à ma jupe, je marchais rapidement dans les couloirs, le bruit de mes pas se répercutant dans les corridors silencieux. Je portais des bas stay up en dentelle et de petits souliers noirs. J'avais coiffé mes cheveux en une tresse française peu serrée qui retombait sur mes hanches. Quelques pas plus loin, j'atteignis ma destination. De tous les endroits de l'institut, la salle de musique était ma place préférée. C'était l'endroit où j'aimais aller quand j'avais envie d'être seule, parce que je savais que ce n'était pas un endroit populaire. Je regardai les guitares avec envie, mais je ne savais pas en jouer, malheureusement. J'avais déjà voulu apprendre, ma ma mère n'avait pas les moyens de me les offrir. Après, je n'avais pas eu l'occasion. Il n'y avait personne ici pour m'apprendre à jouer. J'allumai les hauts-parleurs et les réglai, pas trop fort, puisque la pièce n'était pas parfaitement insonorisée. Je m'installai devant le micro et commençai la chanson. Les notes familières d'une vieille chanson de Daughtry résonnèrent dans les hauts-parleurs. Je fermai les yeux pour me rappeler cette mélodie qui était liée à tant de souvenirs douloureux. Open up your eyes était la seule de mes chansons que ma mère avait déjà chanté avec moi. La seule de mes chansons qui l'avait accrochée. C'était une belle mélodie, et elle m'avait avouée qu'elle lui évoquait mon père. Je m'arrachai à mes souvenirs pour pouvoir chanter, me concentrant sur la mélodie, retenant les tremblements d'émotions qui menaçaient de pointer dans ma voix. Les yeux fermés, dos à la porte, je pris une inspiration et me lançai.

- A single rose left to remember, As a single tear falls from her eye, Another cold day in December, A year from the day she said goodbye. Seems it's only been a moment, Since the angels took him from her arms, And she was left there holding on to their tomorrow, But as they laid him in the ground, Her heart would sing without a sound.

Elle m'avait aussi avoué qu'elle avait l'habitude de chanter avec mon père, et qu'elle avait arrêté après son décès. Her heart would sing without a sound.

- For the first time you can open your eyes, And see the world without your sorrow, And no one knows the pain you left behind, And all the peace you could never find, Is waiting there to hold and keep you, Welcome to the first day of your life, Just open up your eyes.

Cette chanson l'avait délivrée d'un poids, mais je ne l'avais jamais entendu en chanter une autre. J'inspirai profondément avant de poursuivre.

- A single lifetime lays behind her, As she draws her final breath, Just beyond the door he'll find her, Taking her hand he softly says...

Je laissai le refrain aller sans le chanter. Le courage me manquait. Je me repris après pour finir la chanson, le coeur gros. Malgré les années qui passaient, je n'arrivais toujours pas à écouter et à chanter cette chanson sans que le souvenir de ma mère ne revienne. Je ne réussissais jamais à la chanter en entier, et c'était généralement toujours à cette partie que je perdais courage. La chanson suivante commença. Je me repris en main et entamai la chanson suivante, Call your name commença et je la chantai doucement. Open up your eyes était la seule chanson qui me rendait encore émotive après les années.

Jordan marchait en direction de la salle de musique. Il portait des souliers noirs à semelles plates, une paire de jean bleu foncé artistiquement décoloré à certains endroits, une chemise bleu pâle ouverte sur une camisole blanche et il avait sa guitare rouge et blanche dans son dos. Il avait une démarche à la fois élégante, désinvolte et un peu provocante: ses bras se balançaient de chaque côté de son corps, ses épaules étaient droites, sa tête était haute et il avait cet air sûr de lui qui irritait les garçons et faisait tourner la tête des filles. Jordan savait que plusieurs personnes le regardait et ça lui plaisait bien. Bien qu'il n'avait pas été souvent présent à l'Institut Solken durant les quatre dernières années, tout le monde le connaissait de réputation et par son surnom: Light. La plupart des élèves le regardait passer sans lui adresser la parole et sans se mettre dans son chemin. Ils devaient savoir qu'il n'était pas du genre patient. Un ami de Jordan l'interpella et le jeune homme lui donna leur poignée de main en guise de salut. Le grand blond remarqua alors une fille qui le regardait. Elle parut rougir d'un coup et il lui lança un clin d'oeil en poursuivant son chemin.

Après sa traversé remarquée dans les couloirs du rez-de-chaussé, Jordan arriva finalement au local de musique. Il allait ouvrir la porte assez vivement et sans aucune subtilité lorsqu'il entendit une fille chanter. Il colla son oreille à la porte et écouta la voix. Après un certain moment, il reconnu la chanson que la fille chantait: Open Up Your Eyes de Daughtry. Cette chanson était assez triste et Jordan l'aimait bien parce que moindrement qu'on avait perdu quelqu'un de proche, on pouvait s'identifier à la mélodie et aux paroles. Le jeune homme attendit que la chanson se termine, puis il ouvrit doucement la porte. La jeune fille était seule dans la pièce et elle se tenait debout devant un micro, tournant le dos à la porte. Une autre chanson commença et la fille se remit à chanter. Jordan décida de profiter du fait que la chanson jouait assez fort pour s'installer à l'insu de la fille, puisque la chanson allait couvrir le bruit qu'il ferait. Il déposa doucement sa guitare sur le sol et alla chercher deux chaises sans que la fille le remarque, puisqu'il restait derrière son dos. Il revint sur ses pas, s'assit sur une chaise et déposa ses pieds sur l'autre. Maintenant bien installé, il prêta attention à la voix de la fille et attendit. Lorsque la chanson fut finie, Jordan se racla la gorge et lança:

- Tu chantes assez bien.

Il lui offrit un sourire charmeur comme lui seul savait le faire et passa sa main dans ses cheveux, leur redonnant un style rebelle.

- Mais rassures-moi, tu ne chantes pas que des chansons tristes, no?

Ma deuxième chanson finie, j'attendis que la prochaine commence. Néanmoins, alors que les dernières notes résonnaient toujours dans les hauts-parleurs, j'entendis un bruit léger derrière moi et une voix d'homme me dit alors que je chantai bien. Je sursautai et pivotai vivement, échappant mon téléphone dans mon mouvement précipité, alors que le début de No Surprise commençai. Il m'adressa un sourire resplendissant en passant une main dans ses cheveux déjà en bataille. Je bafouillai quelques mots. Je sentais que mes joues étaient en feu. Il me demanda de le rassurer que je ne chantai pas que des chansons tristes. Je ramassai prestement mon téléphone, qui faillit me passer au travers des mains. Depuis quand était-il là? Je débranchai le fil qui reliait mon téléphone aux hauts-parleurs, interrompant la mélodie qui commençait. Je le dévisageai, incapable d'articuler un son. Non seulement il m'avait surprise, mais je me rendais compte qu'il était aussi très beau. Je restai silencieuse un moment. Trop longtemps.

- Ça dépend de mon humeur, répondis-je en me souvenant de sa question.

Je me serai giflée. C'était comme avouer que j'étais triste.

- Enfin, je veux dire, non, pas seulement des chansons tristes, un peu de tout...

J'avais l'impression que je m'enfonçais. Je soupirai et regardai ailleurs. Près de lui, il y avait une guitare électrique rouge et blanche. Je ne pus m'empêcher de sourire, émerveillée.

- Tu joues? De la guitare, je veux dire, ajoutai-je après une seconde. Tu joues de la guitare? C'est génial. J'ai toujours voulu apprendre et...

Je m'interrompis en me rendant compte que je parlais pour rien dire. Je secouai la tête pour me remettre les idées en ordre.

- Désolée, tu m'as fait peur, et je dis n'importe quoi quand je suis nerveuse... Mais dis-moi, depuis combien de temps tu es là? Tu as l'air bien installé...

J'avais l'air ridicule, j'en étais convaincue. L'idée de disparaître au travers du plancher était tentante. Je m'apprêtai à me présenter, mais changeai d'avis. J'avais déjà beaucoup parlé et je préférai éviter d'en dire plus pour l'instant. Qu'est-ce que j'étais puérile!

La fille sursauta et se retourna vivement vers Jordan. Son téléphone tomba sur le sol et le jeune homme ne put s'empêcher de sourire en voyant sa surprise de le voir là. Elle dit quelque chose, mais il n'en compris rien tant c'était incompréhensible. Elle ramassa son téléphone et débrancha le fil qui le reliait aux hauts-parleurs. Elle le dévisagea et Jordan fit de même. Elle portait une jupe bleu sombre, une chemise blanche et un gilet du même bleu que sa jupe et ses cheveux étaient attachés en une tresse. Bien qu'elle faisait un peu trop écolière au goût du jeune homme, il la trouvait jolie.

- Ça dépend de mon humeur, répondit la fille.

Elle continua en bafouillant qu'elle écoutait un peu de tout. Puis elle remarqua sa guitare. Elle sourit, paraissant émerveillée et Jordan fronça les sourcils en se demandant pourquoi elle regardait sa guitare de cette façon. Elle répondit à cette question avant qu'il ait le temps de la poser. Elle lui demanda s'il savait en jouer, ajouta qu'elle avait toujours voulu apprendre, puis elle se tut. Elle parlait beaucoup et semblait nerveuse. D'ailleurs, elle s'excusa. Elle dit qu'il lui avait fait peur et qu'elle dit n'importe quoi lorsqu'elle est nerveuse.

- Mais dis-moi, depuis combien de temps tu es là? Tu as l'air bien installé...

Jordan sourit de nouveau. Cette jeune femme timide et nerveuse était craquante.

- Je suis là depuis le début de Call Your Name, mais je t'ai entendu chanter Open Up Your Eyes. Tu es douée.

Il lui fit un clin d'oeil, puis se leva en prenant sa guitare.

- Et pour répondre à ta question, dit-il d'un ton amusé, oui je sais jouer de la guitare, sinon pourquoi j'en aurais une? Tiens je vais te montrer.

Jordan lui sourit, puis il retira sa chemise bleu pâle aux manches longues, révélant ses bras aux muscles bien découpés, et passa la ganse de sa guitare derrière son cou et son bras droit. Il préférait jouer sans manches. Il passa à côté de la fille et alla brancher sa guitare à un ampli qu'il alluma. Il revint vers elle et se plaça devant un deuxième micro qui'il alluma également.

- Et il parait que je suis un bon chanteur, lança-t-il.

Puisqu'il savait qu'elle connaissait Daughtry, il choisit de jouer le premier couplet et le refrain d'une autre de leur chanson, Everytime You Turn Around. Il commença à jouer de la guitare, puis lorsque ce fut le temps, il commença à chanter. Jordan avait une belle voix qu'il pouvait adapter à plusieurs styles et elle n'était pas du tout aiguë, bien qu'elle n'était pas très grave non plus, et évidemment, il savait réellement chanter. Le jeune homme regarda la jeune femme tout en chantant et en jouant de la guitare.

- Every time you turn around / I know you're standing there / Waiting for me to take it on back down the other road, baby / But I won't let you down / I know you're standing there / Waiting for me to take it on back down the other road, baby / But I won't let you down every time you turn around, yeah.

Jordan arrêta de chanter, mais continua tout de même à jouer quelques notes.

- J'aimerais bien chanter avec toi, dit-il en regardant la jeune femme. Et j'aimerais bien connaître ton nom.

Il arrêta de jouer et sourit.

- Je m'appelle Jordan Miller. Mais ici on me reconnaît plus à mon surnom : Light.

Il me sourit et je ne pus m’empêcher de sourire à mon tour. Néanmoins, mon sourire s’effaça lorsqu’il me dit être là depuis le début de Call your name, mais qu’il m’avait entendu chanter Open up your eyes. Il m’avait entendu chanter. Je virai au rose. J’avais horreur qu’on m’entende chanter, surtout quand je ne connaissais pas la personne qui m’écoutait. La seule personne avec qui j’étais assez à l’aise, c’était Fynn, et ça avait pris plusieurs mois avant que je ne chante en sa présence. Lorsqu’il ajouta que j’étais douée, je m’empourprai seulement davantage, si bien que son clin d’œil ne changea rien à mon teint. Il se releva et pris sa guitare. Je remarquai alors qu’il était grand. Bien plus grand que moi, du moins. Il devait faire 6 pieds, ou pas bien loin. Il me dit alors qu’il savait jouer, sinon il n’aurait pas de guitare, et se proposa à me faire une démonstration. Vraiment? Je souris, j’avais hâte de l’entendre. Il retira sa chemise et je dus mobiliser ma volonté pour empêcher ma mâchoire de tomber. Il portait une camisole blanche qui mettait sa musculature en évidence. Il était vraiment beau, il n’y avait rien à redire. Il passa près de moi pour se connecter à l’ampli et installa un deuxième micro près du mien. Je fronçai les sourcils et il ajouta qu’il était également un bon chanteur. Je n’en doutai pas. Avait-il seulement des défauts? Je giflai mon moi intérieur. Il commença à jouer et je reconnus aussitôt les accords familiers de Everytime you turn around de Daughtry, du même album que celles que j’avais chanté. Ce n’était pas un groupe très connu au Québec et je fus heureuse de savoir que je n’étais pas la seule de leur fan. Il commença à chanter. « Il parait que je suis un bon chanteur »!? Il chantait comme un dieu, oui! Sa voix se mariait parfaitement aux accords de guitare. Je regardai un moment ses mains qui dansaient sur les cordes, puis relevai les yeux vers son visage. Je m’attendais à le voir regarder ce qu’il faisait, au lieu de quoi je me heurtai à ses yeux bleus. Je restai figée, alors qu’il chantait le refrain. Lorsqu’il eut finit, il n’entama pas la suite de la chanson, mais continua à jouer. Il me dit alors qu’il aimerait chanter avec moi. Je n’eus pas le temps de protester qu’il me demanda mon nom, avant de se présenter. Jordan Miller. Bizarrement, son nom sonnait familier. Il ajouta alors qu’ici, il était connu sous le surnom de Light. Et la lumière se fit dans mon esprit.

- LE Light? m’étonnai-je.

Mon moi intérieur poussa un cri de victoire. Au moins, il n’était pas télépathe. Je n’avais jamais eu l’occasion de le rencontrer. Il avait arrêté de visiter le pensionnat l’année où j’y étais entrée, et personne ne savait pourquoi. Pourtant, j’avais entendu des rumeurs, bien sûr. On m’avait déjà dit qu’il était beau, mais je n’avais jamais imaginé à quel point. Je savais aussi que son pouvoir était l’électricité, qu’il était un bagarreur doublé d’un charmeur – Cette pensée me fit un pincement au cœur; Je n’avais rien de spéciale, au fond – et qu’il jouait de la musique. C’était la raison pour laquelle j’avais tant espéré le rencontrer, à mon arrivée ici, du moins après que je me sois sortie de mes idées noires, après le décès de ma mère. Et on m’avait bien sûr dit qu’il ne m’enseignerait probablement jamais. Je réalisai alors que je le fixai, bouche-bée. Je refermai ma bouche, rougissant à nouveau.

- Je… Désolée, c’est jusque j’ai tellement entendu parler de toi. Quand je suis arrivée, on m’a dit que tu passais tes étés ici. Mais tu n’es jamais revenu et…

Me doutant qu’il y avait une raison, je m’interrompis. Si personne ne le savait, c’est parce qu’il ne voulait pas en parler, bien sûr.

- Et c’est très indiscret, pardonne-moi, me repris-je. Je m’appelle Élana Shiver, et je n’ai aucun surnom. Je vis ici depuis quatre ans, alors je connais pas mal les ragots… Et là encore, c’est indiscret…

Je m’interrompis, puis me souvins qu’il voulait chanter avec moi. Même si c’était LE Light, ça ne changeait rien que j’avais le trac.

- Et je ne chante pas quand je sais qu’on m’écoute… ajoutai-je. J’ai le trac.

Je m’efforçai d’afficher un air de reproches. Après tout, il m’avait espionné.

La jeune femme, qui semblait avoir aimé l'interprétation de Jordan, sembla étonnée et ravie d'apprendre qui il était.

- Le Light?

Jordan ne comprenait pas tant sa réaction. Oui il était connu à l'institut, mais pas plus que ça, non? Et pourtant, ça devait, puisqu'elle le regardait bouche-bée comme figée. Elle avait l'air d'une fan qui venait de rencontrer son chanteur préféré. Elle finit par fermer sa bouche et ses joues se colorèrent en rouge, la rendant encore plus craquante. Elle s'excusa en expliquant qu'elle avait juste tellement entendu parler de lui. Elle savait qu'il passait ses étés ici, mais qu'il n'était jamais revenu. Ce n'était pas qu'il n'était pas revenu, c'est qu'il n'était pas revenu aussi souvent qu'avant. Jordan serra la mâchoire aux souvenirs qui lui revenait en mémoire. Il les chassa de ses pensées, se concentrant sur la fille.

- Et c'est très indiscret, pardonnes-moi, dit-elle.

Jordan força un sourire, ne voulant pas y penser plus longuement. Elle se présenta. Élana Shiver. Un prénom pas courant et original. Elle dit alors qu'elle vivait ici depuis quatre ans et qu'elle connaissait pas mal les ragots.

- Et là encore, c'est indiscret...

Jordan haussa les sourcils. Il était un peu dérouté qu'elle cherche à s'excuser autant de son indiscrétion. Il n'était pas habitué à ça. Après tout, il avait une réputation de dur, et il l'était, alors les gens lui balançaient tout ce qu'ils pensaient sans s'excuser et sans se soucier de quoique ce soit.

- Et je ne chante pas quand je sais qu'on m'écoute... ajouta Élana. J'ai le trac.

Elle avait un air de reproche qui venait probablement du fait que Jordan l'avait écouté à son insu. Le jeune homme eut un sourire moqueur.

- Ce n'est pas de ma faute, dit-il d'un ton faussement défensif. J'arrivais pour jouer de la musique quand je t'ai entendu. Je ne pouvais pas faire autrement que de t'écouter chanter! Tu as une belle voix et tu chantes bien.

Un sourire charmeur se dessina sur ses lèvres. Ses yeux se plantèrent dans ceux d'Élana et il s'approcha un peu d'elle.

- C'mon, chante avec moi. Tu n'as pas à avoir le trac : tu es douée.

Jordan se rapprocha encore plus d'Élana, penchant la tête vers le bas pour voir son visage. Ses yeux bleus se posèrent sur les siens.

- Anyway, ce n'est pas comme si j'aillais te laisser le choix, dit-il avec un sourire. Et en général, j'obtiens ce que je veux, ajouta-t-il, un léger sourire en coin.

Son regard était intense et il avait son air charmeur au visage. Il la draguait et c'était évident. Il aimait bien passer du bon temps, que ce soit avec des amis ou avec des filles qu'il trouvait jolies ou intéressantes. Et celle-ci était jolie et intéressante. De plus, elle semblait avoir la même passion que lui. Il était assuré de passer un bon moment avec elle.

- So? murmura-t-il, sa voix un peu envoûtante. Tu chantes avec moi?

Il me sourit, cette fois, d’un air moqueur. Sur un ton faussement défensif, il me dit que ce n’était pas de sa faute, et qu’il venait pour jouer lorsqu’il m’avait entendu, et qu’il n’avait pas eu d’autre choix que de l’écouter chanter, parce qu’elle avait une belle voix et qu’elle chantait bien. Je chantais bien, on me l’avait souvent dit. Ça ne m’empêchait pas d’être nerveuse. Je n’y pouvais rien. Il m’adressa un autre de ses beaux sourires et me regarda en s’approchant. Il m’enjoignit à chanter avec lui, arguant que je n’avais pas besoin d’avoir le trac puisque j’étais douée. Ce n’était pas la question. Je n’avais pas choisi d’avoir le trac. Spécialement quand il se tenait comme ça près de moi, m’écrasant un peu avec sa stature imposante. À côté de lui, je me sentais comme un chat près d’un tigre. Il me fixa de ses yeux bleus et je n’eus d’autres choix que de les regarder. Ils étaient magnifiques. Il ajouta que, de toute façon, je n’avais pas le choix, car il obtenait toujours ce qu’il voulait. Et je devais avouer que j’avais envie d’accepter, mais une boule s’était formée dans mon estomac et ne partait plus. Je voulais secouer la tête, mais j’étais figée, absorbée par l’intensité de son regard. Je savais qu’il me draguait. Je le voyais. Pourtant, dans un sens, ça me plaisait. Et puis, ce n’est pas comme si j’étais en couple, j’avais le droit d’en profiter un peu. Pourtant, je n’étais toujours pas convaincue d’avoir envie de chanter devant lui. En fait, je n’étais pas sûre de pouvoir, en sachant qu’il était là, même s’il m’avait déjà entendu. Je ne savais qu’il était là et c’était une différence non-négligeable. J’hésitais. « So? ». Est-ce que j’allais chanter avec lui? Je ne pouvais pas nier que j’en avais envie. Pourtant, je ne savais pas si je pouvais y arriver. La boule sur mon estomac pesait du plomb. Je m’arrachai à son regard hypnotique en baissant les yeux.

- Je ne peux rien promettre, dis-je enfin. J’ai le trac, et je n’ai pas le contrôle là-dessus. Par contre, je veux bien essayer.

Mes derniers essais pour chanter devant des inconnus n’avaient pas été couronnés de succès. Mais ça faisait longtemps. Je pouvais peut-être y arriver. Je pris place devant mon micro, hésitante. J’allais essayer. N’ayant aucun titre à proposer, je me dis que je verrais bien ce qu’il déciderait de jouer. Il n’y avait pas beaucoup de chansons que je ne connaissais pas du tout. À la rigueur, je pourrais toujours chanter les passages que je connaîtrais.

Élana semblait hésiter, figée, son regard accroché à celui de Jordan. Après quelques instants, elle baissa les yeux et dit qu'elle ne pouvait rien promettre puisqu'elle avait le trac et qu'elle n'y pouvait rien. Mais elle voulait bien essayer. Jordan sourit. Il gagnait toujours avec son charme et ça lui plaisait.

- Great! lança-t-il.

Il releva la tête et alla déposer sa guitare sur les chaises qu'il avait tiré près des micros. Il se tourna vers Élana.

- Je crois que je connais des chansons que tu pourrais connaître.

Jordan sortit son iPod de sa poche droite avant et alla le brancher sur les hauts-parleurs. Il ouvrit l'application musique et regarda les albums qu'il avait en les faisant défiler à l'écran. Il y avait quelques chansons qu'il aurait aimé chanter, mais Élana ne les connaissait probablement pas. Il finit par trouver une chanson qu'elle connaissait probablement et qu'elle allait pouvoir adapter à son style de chant : Couting Stars de OneRepublic. Il aimait bien cette chanson qui lui permettait de chanter en poussant sa voix, tout comme en y allant plus doucement. La chanson pouvait être très bien adaptée à plusieurs styles de chant. Il fit commencer la chanson, puis il donna son iPod à Élana.

- Il y a les paroles, alors tu as une excuse de moins pour ne pas chanter, dit-il d'un ton amusé, un sourire en coin.

Le jeune homme alla vers son micro et commença à chanter alors que le premier couplet commençait. Il le fit sans regarder la jeune femme, puis lorsqu'il arriva au refrain, il la regarda du coin de l'oeil, se demandant si elle allait chanter. Lorsqu'il arriva à la moitié du refrain, il prit le micro dans sa main et marcha vers Élana, tout en continuant de chanter, poussant sa voix.

- Lately I been, I been losing sleep / Dreaming about the things that we could be / But baby, I been, I been prayin' hard / Said no more counting dollars / We'll be, we'll be counting stars.

Il prit la main de la jeune femme et la fit tourner doucement deux fois, d'abord d'un côté, puis de l'autre, et sourit tout en chantant.

- I feel the love / And I feel it burn / Down this river every turn / Hope is our four letter word / Make that money / Watch it burn.

Jordan attendait qu'Élana soit moins gênée et qu'elle chante avec lui. Il trouvait ça dommage qu'elle soit si gênée de chanter alors qu'elle chantait bien et qu'elle avait une belle voix.

Jordan me sourit et alla déposer sa guitare sur les chaises, près des micros. Il me dit qu’il croyait connaître des chansons que je connaîtrai. Je sentis mon estomac se tordre. Est-ce que j’avais vraiment accepté? Qu’est-ce qui m’avais pris? Je restai figée, alors qu’il sortait un iPod de sa poche et le branchait sur les haut-parleurs. Il chercha un moment, puis sembla faire son choix. Un instant plus tard, les notes familières de Counting stars résonnèrent dans la pièce. Oh non. J’adorai cette chanson, comme bien des gens, mais j’avais un mal fou à la chanter sans fausser, pour une raison que je n’avais jamais pu m’expliquer. Ce serait la honte. Et j’avais accepté de changer. Avant que je n’aie le temps de lui dire que ce n’était pas le meilleur choix, il me mit son iPod entre les mains. Il passa presque au travers, mais je le rattrapai de justesse. Il me fit qu’il y avait les paroles, donc ça me ferait une excuse de moins pour ne pas chanter. Oups! Il sourit et je ne pus retenir un sourire embarrassé. Il s’approcha du micro et commença à chanter. Je le regardai, un peu jalouse. Il était si à l’aise, alors que j’étais tétanisée par le trac, et il n’y avait qu’une personne pour m’entendre. Mon estomac se serra un peu plus et je retins l’envie de disparaître par le plancher. Ça m’aurait évité de rester planter là comme une pique, mais si je faisais ça, je ne pourrais plus le regarder en face, et je n’avais pas envie de me priver de ses beaux yeux bleus. Je me frappai mentalement. Mais qu’est-ce qui me prenait? Oui, bon, il était canon, mais tout de même… Je pris une inspiration pour joindre ma voix à la sienne, lorsqu’il avança vers moi en chantant le refrain. Sa voix suivait parfaitement les notes, alors que j’étais presque incapable de chanter cette partie. Il me prit par la main et me fit tournoyer doucement, un sourire aux lèvres en entamant le deuxième couplet. Mon cœur tambourinait violemment dans ma poitrine. Je voulus me joindre à lui, mais je n’avais même pas le micro, et je me sentirai idiote de le prendre et de perdre courage.  Je pris mon courage à deux mains, fermai les yeux alors qu’il entamait le « bridge » de la chanson. Je m’efforçai de taire mon angoisse grandissante et me laissai difficilement porter par la musique. Je me forçai à finir le bridge, même si je n’avais pas de micro.

- I feel something so wrong, Doing de right thing, I could lie, could lie, could lie, Everything that drowns me makes me wanna fly.

À ce moment-là, quelque chose m’échappa. Avant d’avoir le temps de comprendre ce que je faisais, je m’approchai de Jordan, plus particulièrement du micro qu’il tenait, pour chanter avec lui.

- Lately I’ve been, I’ve been losing sleep, Dreaming about the things that we could be, But baby I’ve been, I’ve been prayin’ hard, Said no more counting dollars, we’ll be, we’ll be counting stars.

Ma gêne était partie. Je pivotai sur moi-même pour saisir le deuxième micro et me lançai, confiante, dans le seconde moitié du refrain, soulagée de ne pas fausser, mon regard rivé sur les yeux bleus de Jordan. Je me surprenais moi-même. Peut-être parce que c’était la première fois que je rencontrai quelqu’un qui partageait ma passion. Les barrières étaient tombées. Le nœud dans mon estomac, disparut, alors que je chantai de concert avec lui.

- Ohh, Take that money, watch it burn, Sink in the river the lessons I learned. Everything that kills me... makes me feel alive.

Je terminai le refrain, toujours sans fausser. Lorsque les dernières notes s’envolèrent, je me rendis compte que j’avais mis, à un moment ou un autre, son iPod dans la poche de ma jupe. Je le lui rendis avec un sourire désolé.

- T’en fais pas, je n’avais pas l’intention de le voler.

Pour une raison que je ne m’expliquai pas, j’étais mal à l’aise de m’être laissée aller comme je l’avais fait. Néanmoins, j’étais heureuse d’avoir réussi à le faire, même si je ne connaissais pas Jordan avant aujourd’hui.

- C’était génial de chanter avec toi, lui dis-je avec un sourire.

Après quelques instants à regarder Jordan, Élana finit par chanter avec lui, encore gênée. Le jeune homme fut donc surpris quand la jeune femme s'approcha de lui pour chanter avec le même micro. Il sourit et descendit un peu le micro, se penchant vers elle pour continuer à chanter. Puis, Élana pivota et saisit l'autre micro, son regard rivé au sien. En agissant avec plus de confiance en elle, Élana paraissait plus sexy au lieu d'être seulement mignonne. Elle se laissait aller et c'était une bonne chose, puisqu'en se laissant aller, elle devenait elle-même. La chanson se termina et la jeune femme redonna le iPod à son propriétaire, l'assurant qu'elle n'avait pas eu l'intention de le voler. Jordan se contenta de sourire.

- C'était génial de chanter avec toi, dit Élana en souriant.

Jordan sourit à son tour et passa sa main dans ses cheveux.

- Je sais, répondit-il d'un ton aucunement modeste, avant de lui faire un clin d'oeil.

Il s'approcha de la jeune femme.

- Tu t'es très bien débrouillée. Et c'était génial quand tu t'es laissé allée. Really. Tu devrais faire ça plus souvent au lieu de chanter toute seule.

Il fronça les sourcils, prenant un air semi sérieux semi moqueur.

- C'est un crime de garder ta belle voix juste pour toi.

Le jeune homme sourit, puis avança, se retrouvant tout près d'elle.

- Je connais un bar où on peut faire du karaoké, si tu veux. Je suis certain qu'on y passerait du bon temps.

Jordan avait bien aimé chanter avec Élana. Surtout quand elle s'était laissée aller. La musique était sa passion et il aimait bien la partager. Il avait envie chanter avec elle et de la séduire. Il faut dire qu'elle était jolie et amusante, ce qui était toujours bien pour passer un bon moment et il le savait très bien. Si la jeune femme se laissait aller un peu, il était certain de bien s'amuser. Il la regarda quelques instants, son regard posé sur ses yeux vert-bleu. Jordan se doutait bien qu'il allait devoir y aller doucement avec Élana s'il voulait la draguer sans qu'elle ne prenne peur. Sa gêne allait probablement l'empêcher de tomber rapidement dans les bras du jeune homme. Surtout si elle apprenait qu'il aimait bien flirter avec les filles. Mais le savait-elle déjà? Après tout, elle lui avait dit qu'elle avait entendu parler de lui. Qu'avait-elle entendu? Il se pencha un peu vers elle, un sourire charmeur étirant ses lèvres.

- Je sais qu'on ne se connait pas vraiment, quoique tu as dit avoir entendu parler de moi... Je suis curieux, ajouta-t-il. Qu'est-ce que tu as entendu?

Jordan pris son iPod avec un sourire et passa une main dans ses cheveux, les décoiffant un peu plus, avant de me répondre un simple « Je sais ». Je fis un effort pour ne pas avoir l’air trop choquée. Ça en avait peut-être pas l’air comme ça, mais ça m’avait beaucoup demandé de chanter avec lui, même si il y avait une barrière qui avait cédé dans le processus et rendu la chose plus facile. Il s’approcha de moi et je le regardai. Je m’étais un peu rembrunit. Il me dit alors que je m’étais bien débrouillée et que c’était génial quand je m’étais laissée allée, et que je devrais faire ça plus souvent au lieu de chanter seul. Il ajouta, un peu plus moqueur, que c’était un crime de garder ma belle voix pour moi seule. Cette fois, je souris. Bon, d’accord, il n’était pas modeste du tout, mais il était indéniablement charmant. Je voulus lui dire que je ne chantais pas toujours toute seule, mais il s’approcha un peu plus, sourire aux lèvres, en me disant connaître un bar où on pouvait faire du karaoke et qu’on pourrait y passer du bon temps. Karaoke? Oh non! Pas ça. Pas devant tant de gens. Et puis, je souris un peu. Un bar karaoke. Problème réglé; Je n’avais pas l’âge de sortir dans les bars. Encore un an avant de pouvoir y aller. Ça laisserait le temps à Jordan d’oublier. Je ne dis rien, néanmoins. Je savais qu’il était plus vieux que moi. Il devait avoir 19 ou 20 ans, je n’étais plus trop sûre. Je ne voulais pas qu’il pense que je n’étais qu’une gamine et qu’il laisse tomber. Il s’approcha de moi, un sourire aux lèvres, et me dit savoir qu’on ne se connaissait pas vraiment, bien que j’aie entendu parler de lui. Je m’attendais à ce qu’il me demande de lui parler un peu de moi, pour équilibrer, au lieu de quoi il demanda plutôt ce que j’avais entendu à son sujet.

- En fait… Pas grand-chose, répondis-je. Lorsque je suis arrivée ici, il y a quatre ans, on m’a dit que je pourrais bientôt rencontrer Light, un pensionnaire occasionnel à l’institut qui venait seulement l’été. Alors, j’ai demandé si c’était ton vrai nom, et on m’a dit que c’était ton surnom, puisque tu contrôlais la foudre. Dans les couloirs, j’entendais les filles vanter ta beauté et ton charme, et les garçons dire que tu n’étais qu’un bagarreur et un coureur de jupons et…

Je m’interrompis. Même si c’était pour relater des ouïes-dire, je l’avais tout de même traité de coureur de jupon. Oups…

- Et tu n’es jamais venu. Ça a été le même scénario l’été suivant. Ensuite, les gens ont commencé à oublier. Il y avait quelques bruits de couloir, mais rien de plus.

Je me souvenais maintenant qu’il avait l’habitude de venir seulement l’été. Été qui touchait à sa fin.

- Est-ce que tu repars bientôt? Si ce n’est pas trop indiscret.  

Je lui aurais bien demandé pourquoi il avait arrêté de venir, mais c’était indiscret. C’était comme me demander pourquoi j’étais venue vivre ici. Une question à laquelle je n’avais pas forcément envie de répondre.

Élana répondit qu'elle n'avait pas entendu grand chose. Lorsqu'elle était arrivée ici, quatre ans plus tôt, elle avait entendu parler d'un Light qui était un pensionnaire occasionnel à l'institut et qui venait seulement l'été. En demandant aux autres si Light était son vrai prénom, elle avait appris qu'il contrôlait la foudre. Elle avait entendu les filles vanter sa beauté et son charme, alors que les garçons disaient qu'il n'était qu'un bagarreur et un coureur de jupons. Jordan sourcilla. Coureur de jupons, vraiment? Le jeune homme ne se décrivait pas comme ça.

- Et tu n'es jamais venu, continua la jeune femme. Ça a été le même scénario l'été suivant, Ensuite, les gens ont commencé à oublier. Il y avait quelques bruits de couloir, mais rien de plus.

Elle se tut, puis demanda soudainement s'il allait repartir bientôt. Jordan sourit.

- Non, je ne devrais pas, répondit-il. J'ai décidé de m'installer ici. D'ailleurs, je viens d'avoir un appartement au troisième étage.

Il se retourna, prit sa guitare dans ses mains et s'assit sur une chaise. Il leva les yeux vers Élana et lui sourit.

- Avec tout ce que tu as entendu, tu en sais plus sur moi que moi sur toi. Même si tout ce que tu as entendu n'est pas nécessairement vrai.

Jordan baissa la tête et joua quelques accords sur sa guitare, même si elle n'était pas branchée à un ampli. La musique ne se fit pas vraiment entendre, mais le jeune homme était concentré quand même.

- Et si tu me parlais de toi?

Il releva la tête, plantant son regard dans celui d'Élana.

Jordan e sourit et me dit qu'il avait plutôt prévu s'installer à l'institut, et qu'il venait d'avoir un appartement, au troisième. Je retins un sifflement admiratif. J'avais déjà voulu un de ces appartements, mais Anastasia avait refusé puisque j'étais encore étudiante et encore jeune. Néanmoins, elle m'en avait montré un, et ils étaient géniaux. C'était tout une chance. Il prit sa guitare et s'assit en me regardant. Il me dit qu'avec ce que j'avais entendu, j'en savais plus sur lui qu'il en savait sur moi, même si ce que je savais n'était pas forcément la vérité. Évidemment, avec les ragots, c'était comme ça, et je le savais. Je me doutais qu'il référait spécialement à la partie « coureur de jupons », je l'avais vu tiquer. Il joua quelques accords. Les notes étaient sourdes, presque inaudible, sans doute à cause de l'absence d'ampli. Pourtant, il était intensément concentré. Je le regardai. Ses cheveux jetaient une ombre sur son regard, assombrissant le bleu de ses yeux. Ses doigts couraient sur la guitare, reconnaissant presque instinctivement les accords qu'il voulait jouer. J'aurais pu le regarder pendant des heures. Lorsqu'il releva les yeux vers moi, je me sentis rougir un peu comme une adolescente se faisant surprendre à observer un beau mec de loin. Je soupirai pour me redonner contenance et lui sourit. Il me demanda alors de lui parler de moi.

- Moi? répétai-je, surprise.

Lui parler de moi? Que dire?

- Il n'y a pas grand-chose à dire, sincèrement…

Je détestai lorsqu'on me répondait ça, aussi je me repris;

- Enfin, si… Mais je ne suis pas une personne très intéressante. Je veux dire, je vis ici depuis quatre ans, je vais à l'école, je travaille, je chante, je fais du sport.

Je fis une moue en haussant les épaules.

- Je suis vraiment banale, en fait…

C'était vrai. Je ne m'étais jamais considérée comme une fille ayant quelque chose de spécial, ni comme une personne sociable. J'étais solitaire. J'avais moins d'amis que j'avais de doigts sur une seule main – Fynn en l'occurrence – et je n'avais plus de famille. À l'école, je connaissais certaines personnes, mais je traînais surtout à la bibliothèque ou au gymnase. Ce n'était pas tant que les gens ne voulaient pas m'approcher que j'étais généralement trop dans ma bulle pour leur ouvrir une place. Je regardai mes pieds un moment, puis un sourire étira le coin de mes lèvres.

- J'ai seulement une différence majeure avec la plupart des filles...

Je regardai rapidement autour de moi, cherchant un moyen de lui montrer mon pouvoir, puis mon sourire s'élargit un peu plus.

- C'est que peu importe comment tu pourras essayer, tu ne réussiras jamais à m'attraper si je ne te laisse pas faire. Si tu ne me crois pas, tu peux essayer.

Je modifiai ma densité corporelle, de sorte à ce qu'il me passe au travers s'il essayait. J'avais la même consistance que l'eau. Il pourrait sentir qu'il me traversait, mais il ne pourrait pas me retenir. En même temps, ça m'évitai de descendre au niveau inférieur en passant par le plancher. Néanmoins, je savais que mon corps n'avais absolument pas changé physiquement malgré que je n'ai plus la même consistance. Je n'étais ni translucide, ni évanescente, ni brouillée, ni quoi que ce soit. J'étais seulement là, le regardant d'un air amusé.

Élana sembla étonnée que Jordan lui demande de parler d'elle. Elle lui dit qu'elle n'avait pas grand chose à dire, puis se repris en disant qu'il y avait des choses à dire, mais qu'elle n'était pas une personne très intéressante. Jordan fronça les sourcils. Il n'était pas d'accord avec elle : il la trouvait intéressante. La jeune femme dit qu'elle vivait ici depuis quatre ans, qu'elle travaillait, qu'elle chantait et qu'elle faisait du sport. En haussant les épaules, elle conclut qu'elle était vraiment banale. Jordan ne répondit rien, même s'il ne pensait pas comme elle, continuant à jouer quelques accords. Il était habitué d'entendre plusieurs filles dire qu'elles étaient banales ou inintéressantes et en général il ne s'en préoccupait pas, bien qu'il trouvait cela dommage. Élana regarda ses pieds un moment, puis ses lèvres dessinèrent un sourire en coin. Jordan fronça les sourcils, se demandant pourquoi elle souriait ainsi.

- J'ai seulement une différence majeure avec la plupart des filles, déclara-t-elle.

Le jeune homme haussa les sourcils, intrigué. Il cessa de jouer de sa guitare alors qu'Élana regardait autour d'elle, semblant chercher quelque chose. Au moment où Jordan aillait lui demander ce qu'elle cherchait, elle sourit un peu plus. Elle lui dit alors que peu importe comment il essayerait, il n'arriverait pas à l'attraper à moins qu'elle le veuille.

- Si tu ne me crois pas, tu peux essayer, proposa-t-elle avec un air amusé.

Jordan fronça les sourcils. Bien sûr qu'il pouvait l'attraper! C'était quoi ce défi? Le jeune homme se leva, déposa sa guitare sur sa chaise, puis s'approcha d'elle. Voyant qu'elle ne tentait pas de s'éloigner de lui, le jeune homme fronça les sourcils. Il observa l'air amusé d'Élana un moment, puis il comprit. Elle possédait un pouvoir qui lui permettrait de lui échapper. Mais qu'est-ce que c'était? La rapidité surnaturelle de mouvement? La téléportation? Pour le savoir, le jeune homme devait tenter quelque chose. Il leva la main avec l'intention de lui agripper le bras droit, mais, à son grand étonnement, il passa au travers du bras, puis du ventre d'Élana. Le jeune homme retira vivement son bras de son corps, un air surpris sur son visage. C'était donc ça le pouvoir de la jeune femme? Il la regarda.

- Wow, dit-il avec un petit sourire. That was... strange.

Jordan se passa la main dans ses cheveux et l'observa quelques instants. En pensant à son propre pouvoir, il eut une idée.

- Si je comprends bien, tu peux passer au travers des choses et des personnes, commença-t-il. Mais, peux-tu passer au travers de mon pouvoir?

Il ferma son poing droit et le leva devant lui. Des éclairs bleutés se promenèrent sur sa main fermée. La puissance qu'ils renfermaient était semblable à celle d'un choc statique, alors Élana n'aurait pas mal si elle ne pouvait pas passer au travers.

- Veux-tu essayer?

Jordan parut d'abord curieux, puis sceptique. Il avait l'air de se dire que m'attraper n'avait rien de difficile. Je me mordis la lèvre pour empêcher mon sourire de s'élargir encore plus. Il se leva en posa sa guitare et s'approcha, mais je ne bougeai pas d'un pouce. Il m'observa, puis sembla comprendre que je faisais allusion à mon pouvoir. Il devait néanmoins se demander de quoi il s'agissait puisqu'il essaya de m'attraper le bras. Un frisson me parcourut lorsque son bras me traversa. C'était une sensation un peu désagréable, bien que nullement douloureuse. Il récupéra rapidement son bras qui traversait mon corps, visiblement surpris, puis il eut un petit sourire en me disant, en anglais, que c'était étrange. Il passa une main dans ses cheveux, puis m'observa. Puis, un éclair [que je suis drôle ahah] traversa son regard. Il me dit qu'il croyait comprendre que je pouvais passer au travers des gens et des choses, mais qu'en était-il de son pouvoir? Avant que je n'ai le temps d'ouvrir la bouche, il leva le poing et des éclairs bleus crépitèrent sur sa peau. Ils semblaient inoffensifs, sans doute pas très fort. Il me demanda alors si je voulais essayer. Je regardai les éclairs, sceptique.

- La dernière fois que j'ai traversé un pouvoir élémentaire, je me suis brûlée, admis-je.

Je me souvenais de la crise de Yann lorsque je l'avais pris par le bras. En m'éloignant, mon bras avait traversé le sien, me laissant une vilaine brûlure qui n'avait heureusement pas laissé de marque.

- Mais c'était différent, ajoutai-je. Je veux bien essayer, mais fais gaffe à ne pas m'électrocuter.

Je réduis encore plus ma consistance. J'étais aussi inconsistante qu'un courant d'air. Je m'approchait de lui et passai ma main au travers de sienne, prudemment. Rien. Curieuse, je me plaçai à côté de lui et traversai son poing, et son pouvoir, pas trop vite, mais pas trop lentement. Je sentis les étincelles crépiter à l'intérieur de mon corps, mais elles ne m'atteignirent pas. Lorsque son poing ressortit dans mon dos, les étincelles éclatèrent contre ma peau avec un bruit similaire à la statique. Je sursautai en m'éloignant rapidement, traversant sa chaise et sa guitare. Je portai un main à ma bouche et soupirai de soulagement. Je ne les avais pas renversé. Je le regardai.

- On dirait que c'est seulement lorsque je sors de la zone d'influence d'un pouvoir qu'il m'atteint.

Je me disais que les éclairs avaient peut-être seulement réagit à cause des agrafes en métal de mon soutien-gorge, mais je préférai garder cette hypothèse pour moi. Après tout, même si mes  vêtements perdaient leur consistance autant que moi, du métal restait du métal, et il conduisait l'électricité.

Élana regarda les éclairs sur le poing de Jordan et ne sembla pas avoir très envie d'essayer de passer au travers. Elle lui dit que la dernière fois qu'elle avait tenté de passer au travers d'un pouvoir élémentaire, elle s'était brûlée. Jordan fronça les sourcils. Qu'avait-elle fait pour se brûler? Elle ajouta que c'était une situation différente et qu'elle voulait bien essayer.

- Mais fais gaffe à ne pas m'électrocuter.

Le jeune homme sourit. Il n'avait pas mis assez de force dans ses éclairs pour lui faire mal. Élana s'approcha et passa sa main au travers du poing de Jordan. Il regarda la main de la jeune femme, une sensation étrange se développant dans son poing. Élana sembla intéressée à pousser l'expérience plus loin. Elle se plaça à côté de lui et traversa lentement son poing. Jordan la regarda avec intérêt, se demandant si elle allait sentir ses éclairs ou non. Alors que son poing ressortait du dos d'Élana, Jordan entendit le bruit d'un choc statique. Il vit la jeune femme sursauter et s'éloigner rapidement. Il fit disparaître ses éclairs et regarda Élana. Avait-elle réellement échouée à traverser son pouvoir sans se faire toucher? Elle se tourna vers lui et lui expliqua qu'il semblait que c'était seulement lorsqu'elle avait fini de traverser un pouvoir qu'il l'atteignait. Jordan fronça les sourcils. Elle ne pouvait donc pas se sauver complètement de l'effet des pouvoirs élémentaires. Mais ses éclairs n'avaient pas eu l'effet qu'ils auraient eu si elle n'aurait pas utilisé son pouvoir.

- Ton pouvoir n'est pas tant pratique contre les pouvoirs élémentaires, remarqua Jordan. Une chance que ce n'était que de l'électricité statique dans ma main.

Le jeune homme sourit et s'approcha d'Élana.

- Je me demande, est-ce que tu contrôles bien ton pouvoir? Et tes émotions, est-ce qu'elles te déconcentrent?

Il se rapprocha plus, puis se pencha vers elle.

- Si je décidais de t'embrasser, pourrais-tu garder le contrôle? demanda-t-il en plantant son regard dans les yeux de la jeune femme, son visage proche du sien, ses lèvres étirées par un sourire en coin.

Jordan fronça les sourcils, alors que je me remémorais la crise de Yann, quelques jours plus tôt, où j'avais traversé son bras pendant qu'il perdait le contrôle de son pouvoir. À ce moment là, je m'étais brûlée également. Peut-être était-ce seulement ma technique, car comme cette fois avec Jordan, j'avais la même méthode que si j'avais voulut traverser un mur. Peut-être y avait-il une autre alternative, un autre moyen d'utiliser mon pouvoir que je ne connaissais pas encore. Peut-être Jordan serait-il d'accord pour pousser l'expérience un peu plus loin. Et si, dans ce cas, c'était seulement l'agrafe de mon soutien-gorge, comme je pensais, peut-être que ça fonctionnerait si je n'en portais pas. Pourtant, si ça avait été le cas, je ne me serais pas brûlée avec Yann. La voix de Jordan me fit alors sursauter. Il remarqua que mon pouvoir n'était pas des plus efficaces contre les pouvoirs élémentaires comme le sien. Heureusement, il n'avait utilisé que de l'électricité statique. Je fronçais les sourcils à mon tour, y réfléchissant, lorsqu'il s'approcha de moi, sourire aux lèvres. Je le regardais, incapable de me souvenir de ce à quoi je pensais. Il était vraiment beau. Il me demanda alors si je contrôlais bien mon pouvoir, si mes émotions me déconcentraient. Il était vrai que mon pouvoir agissait parfois malgré moi, mais c'était généralement pour me préserver d'un danger ou d'une situation que j'appréhendais. Puis, il me demanda, et je compris avec un temps de retard, si je pourrais garder le contrôle s'il m'embrassait. Je le dévisageais un moment. Il était penché tout près de moi, un sourire aux lèvres. Puis, sa question se fraya un chemin jusqu'à mon cerveau et je reculais d'un pas en rougissant.

-  Je… Je ne sais pas, répondis-je. En général, je maîtrise bien mon pouvoir, mais quand j'ai peur, que je suis en danger ou que j'appréhende quelque chose, il réagit parfois par lui-même… Ou même quand je suis nerveuse.

Je le regardais en repensant à sa question. S'il m'embrassait? Je frémis à cette idée, puis fronçai les sourcils, le dévisageant.

- Mais pourquoi ferais-tu ça? demandais-je. Je veux dire, pourquoi tu m'embrasserais?

Je me doutais que s'il le faisait, il y aurait des chances que mon pouvoir réagisse sans mon ordre. Pourtant, c'était idiot. Il était beau à tomber, je n'avais aucune bonne raison de ne pas vouloir. Une petite voix dans ma tête me rappela que techniquement, j'étais avec Fynn. Mais je la fis taire. Fynn et moi n'étions pas vraiment un couple, et elle le savait aussi bien que moi. M'enfin... J'essayais de m'auto-administrer une bonne dose de self-control. Si Jordan essayait de m'embrasser - Bien qu'il n'ait aucun raison de le faire - je préférais encore qu'il réussisse… Et s'il n'essayait pas, et bien je devrais au moins garder contenance. J'observais ses beaux yeux bleus un moment, ne sachant pas trop si je voulais ou non qu'il le fasse.

Élana dévisagea Jordan pendant quelques instants, puis recula d'un pas. Le jeune homme remarqua que les joues de la jeune femme avaient pris une teinte rosée. Élana répondit qu'elle contrôlait bien son pouvoir, mais qu'il arrivait qu'elle perde le contrôle lorsqu'elle avait peur, lorsqu'il y avait un danger, ou lorsqu'elle appréhendait quelque chose. Dans ces cas-là, ou même lorsqu'elle était nerveuse, son pouvoir pouvait réagir par lui-même. Jordan ne fut pas trop surpris de sa réponse, puisqu'il se doutait bien qu'elle devait perdre le contrôle de temps en temps. Aussi, il voyait bien qu'elle était timide et gêné, alors cela ne l'étonnait pas qu'elle perde le contrôle lorsqu'elle était nerveuse ou en danger. Lui-même perdait encore le contrôle parfois.

Élana fronça les sourcils et le dévisagea. Le sourire de Jordan s'élargit.

- Mais pourquoi ferais-tu ça? demanda la jeune femme. Je veux dire, pourquoi tu m'embrasserais?

- Why not? répliqua Jordan. Tu es belle, amusante et intéressante. Alors pourquoi pas?

Il avança d'un pas, se retrouvant aussi proche d'elle qu'il l'était avant qu'elle recule.

- As-tu peur d'un simple baiser? demanda-il moqueur. Ou as-tu peur de perdre le contrôle de ton pouvoir?

Il leva sa main droite et la déposa sur la nuque d'Élana, se rapprochant d'elle. Leurs corps se touchaient presque.

- Je sais que je ne te laisse pas indifférente, dit-il. Alors tu n'as qu'à en profiter.

Jordan lui fit un clin d'oeil, tandis qu'un sourire charmeur se dessinait sur ses lèvres. Il se pencha vers elle, murmurant à son oreille :

- C'est ton choix.

Il recula légèrement la tête, se retrouvant devant le visage d'Élana. Il la regarda dans les yeux un moment, puis il se pencha vers sa bouche. Ses yeux se fermèrent et ses lèvres effleurèrent celles de la jeune femme.

Je sentais mon cœur cogner fort contre ma poitrine. J’avais souvent froid, mais ce n’était pas le cas, présentement. J’avais l’impression que mon corps était en feu, et je savais que mes joues étaient toujours rouges. Je m’efforçai de me calmer, regardant les beaux yeux de Jordan. C’était vrai. Pourquoi m’embrasserait-il? Je n’avais rien de particulier.
Il choisit moment pour me répondre que j’étais belle, amusante et intéressante, alors il n’avait pas de raisons de ne pas vouloir m’embrasser. Je rougis encore un peu plus, alors qu’il se rapprochait de moi, récupérant la distance que j’avais mise entre nous. Cette fois-ci, je restai immobile. Il me demanda si j’avais peur d’un simple baiser, ou seulement de perdre le contrôle de mon pouvoir.
Peur? Ce n’était pas le mot que j’aurais utilisé. Évidemment, je n’avais pas peur. Je… j’appréhendais ce baiser. L’idée me rendait nerveuse, parce que pour lui, ça semblait être un jeu. Je le connaissais à peine, et même s’il était beau à tomber, je n’étais pas sûre de vouloir jouer le jeu.
Je sentis alors la main chaude de Jordan se poser sur ma nuque et il s’approcha un peu plus, si bien que je dus lever la tête pour le regarder. Ce que je détestais être si petite! Je sentais la température monter entre nos deux corps. On se touchait presque. Presque… Je résistai à l’envie de m’approcher davantage, le regardant plutôt. Mes joues étaient encore rouges. Son teint à lui était normal. Pâle, mais bronzé malgré tout.
Il me dit alors savoir qu’il ne me laissait pas indifférente et que je n’aurais qu’à en profiter. Il me fit un clin d’œil, un sourire charmant accroché aux lèvres. Il se pencha vers moi, et je sentis les battements de mon cœur accélérer un peu plus. Ça y était… Ou pas. Je ne pus m’empêcher de froncer les sourcils, puis je sentis son souffle chaud contre mon oreille. C’était mon choix.
Bien sûr, si je ne souhaitais pas qu’il m’embrasse, je n’avais qu’à me rendre inconsistante et partir. Mais d’une certaine façon, j’en avais envie. C’était vrai. Il ne me laissait pas indifférente. Ça ne servait à rien de le nier.
Il s’éloigna alors un peu de moi, et un instant je me perdis dans ses yeux bleus. Puis, il les ferma et je réalisais qu’il s’était penché sur moi. Je sentis alors ses lèvres effleurer les miennes. Je restais immobile, en me demandant comment mon corps réagirait, fermant seulement les yeux.
Je sentis alors le poids de ses lèvres sur les miennes. J’avais réussi à me contrôler! Sans vraiment réfléchir, je levai ma main droite, la déposant sur sa nuque, puis la glissant dans ses cheveux. Pendant ce temps, ma main gauche se posa sur ses omoplates et je me serrai un peu plus contre lui, en répondant à son baiser.
Nos lèvres se pressèrent davantage, me faisant frissonner légèrement. Une petite voix dans ma tête me rappela que ça faisait longtemps que je n’avais pas embrassé un garçon. Au même moment, le contact disparut. Je rouvris les yeux et reculai prestement en comprenant que c’était mon pouvoir qui faisait des siennes.
Les joues rouges, je plaquai une main sur ma bouche. Un instant, j’eus envie de me jeter au travers du mur, mais je me retins.
- Désolée, je… Je ne sais pas ce qui s’est passé…
La honte! S’il était possible d’en mourir, il faudrait m’amener à l’hôpital sur le champ. Je le fixai un moment, sans trop savoir quoi dire ou quoi faire. C’était tellement embarrassant!
- Je suppose que je ne le contrôle pas si bien… soupirai-je en forçant un petit sourire mal à l’aise.
Je l’observai un moment, puis baissai le regard en me demandant pourquoi mon pouvoir avait réagi comme ça, après coup. Sans doute la petite voix dans ma tête. C’était vrai que je n’avais pas embrassé de garçon depuis longtemps, principalement pour acheter la paix avec Fynn. Mais si nous n’étions pas vraiment ensemble, elle me faisait souvent des crises de jalousie. Je relevai les yeux vers lui.
- Et toi? demandai-je alors. Comment contrôles-tu ton pouvoir?  Tes émotions te jouent-elles des tours comme les miennes?
Je m’efforçai de dissimuler mon malaise, et j’espérai qu’il ne partirait pas pour si peu.

Jordan senti ses lèvres entrer en contact avec celles d'Élana et il senti presque aussitôt une des mains de la jeune femme se poser sur sa nuque et glisser dans ses cheveux. Puis, son autre main se posa dans le haut de son dos. Jordan sourit intérieurement. Ces gestes signifiaient clairement que la jeune femme était intéressée par lui. Il pressa un peu plus sa main sur la nuque d'Élana, l'attirant à lui tout comme elle le faisait avec lui. Jordan se surpris à aimer ce baiser plus qu'il n'y aurait pensé, mais il ne s'en soucia guère. Au moment où leurs lèvres se pressèrent plus, le jeune homme ne senti plus rien. Il perdit quelque peu l'équilibre, mais redevint stable aussitôt. Il regarda Élana et ne pu s'empêcher de sourire en voyant qu'elle avait les joues rouges et une main plaquée sur sa bouche.

- Désolée, je... Je ne sais pas ce qui s'est passé...

Jordan ne connaissait pas la raison exacte, mais il savait que c'était le baiser qui avait fait perdre le contrôle à Élana. Celle-ci le fixa quelques instants avant de lui dire, avec un petit sourire gêné, qu'elle supposait qu'elle ne contrôlait pas son pouvoir aussi bien qu'elle le pensait. Le sourire du jeune homme s'élargit. Elle baissa le regard, puis le releva avait de lui demander comment il contrôlait son pouvoir.

- Tes émotions te jouent-elles des tours comme les miennes?

Le sourire de Jordan s'effaça quelque peu. Il ne perdait pas le contrôle de ses pouvoirs avec les filles et il ne savait pas si c'était parce qu'il les maîtrisait bien ou si c'était parce qu'il ne ressentait rien pour elles, ou du moins, qu'il n'était pas amoureux d'elles. Il fonça les sourcils, refusant d'y penser plus longuement. Une chose était certaine, il savait qu'il perdait le contrôle lorsqu'il était en colère. Et plus il était en colère, plus il perdait le contrôle et plus il était dangereux pour les gens autour de lui.

- Oui, répondit-il après un certain temps. Je ne suis pas très bon pour garder le contrôle de mes pouvoirs quand je suis en colère. En fait, je ne suis pas très bon pour garder le contrôle de moi-même.

Il regretta d'avoir d'avoir dit cette dernière phrase. Il ne voulait quand même pas faire peur à Élana. Il lui sourit, puis dit d'un ton moqueur:

- Mais, comme tu as vu, je ne perds pas le contrôle quand on m'embrasse.

Jordan souris de me voir si embarassée. J’aurais aimé que le baiser dure un peu plus longtemps. J’ignorais si c’était également son cas. Alors que je posai ma question, son sourire s’effaça à demi. Pourquoi? Il semblait se contrôler,malors pourquoi cette réaction? Après un bref instant, il fronça les sourcils, puis répondit que ça lui arrivait également de perdre le contrôle, et qu’il avait du mal à gérer son pouvoir lorsqu’il était en colère, et même qu’il n’était pas très pour se contrôler lui-même. Qu’est-ce qu’il voulait dire par là? Il avait du mal à garder la maîtrise de ses émotions? Pourtant, il me semblait parfaitement maître de lui-même. Beaucoup plus que moi, en tout cas. Ou peut-être ne prenait-il pas les choses trop à coeur. Je ne pus m’empêcher de froncer les sourcils, en réfléchissant au sens de cete phrase qui, je l’avoue, m’échappait. Puis il me sourit et me dit, moqueur, qu’il ne perdait pas le contrôle lorsqu’on l’embrassait. Je m’empourprai et baissai le regard, mal à l’aise. Ce n’était pas la première fois que je vivais une situation de ce genre et c’était toujours aussi embarassant. Je me demandai si c’était mon appréhension de la réaction de Fynn qui m’avait fait réagir, puisque ce genre d’incident se produisait généralement avant le baiser, et non durant... Mais je préférai ne pas lui en faire part. Certes, il n’y avait rien de sérieux entre elle et moi. Il était vrai que je l’appréciais beaucoup, mais nous n’étions pas ensemble. J’avais le droit de flirter, même si elle le prenait toujours très mal. Et même si je devais avouer que Jordan me plaisait particulièrement, je ne le connaissais pas. J’osai relever les yeux vers lui et l’observa un moment.

- Je suppose que c’est mon subconscient qui me rappelle que je ne te connais pas vraiment, dis-je enfin.

Je ne savais pas trop quoi ajouter. La situation me mettait terriblement mal à l’aise et je ne savais pas trop à quoi m’en tenir. Je me retournai pour lui faire dos et allai récupérer le micro là où je l’avais abandonné. Puis, je me retournai vers lui en le fixant.

- Mais je suis intéressée à apprendre à mieux te connaître, si tu veux bien, ajoutai-je.

Je sentais que j’avais rougi un peu plus, mais je le regardais sans broncher, micro à la main. La musique que les gens écoutaient en disait parfois beaucoup sur leur personnalité. Et même si Counting Stars avait été un hit musical, certaines personnes ne l’auraient pas dans leur iPod. C’était une chanson que j’aimais beaucoup. J’étais curieuse de voir quelles autres chansons il avait. J’avais, pour ma part, beaucoup de chansons qu’il ne connaîtrait sûrement pas, même si je les adorais.

- Si tu veux, on peut chanter ensemble encore. Puisque la musique est notre passion commune, c’est un bon début, non?

Je lui souris, espérant que la musique et le chant permettrait de surmonter le malaise que je ressentais.

Élana avait froncé les sourcils lorsque Jordan avait dit qu'il n'était pas très bon pour garder le contrôle de lui-même. Il espérait qu'elle ne s'imaginait pas qu'il était très violent ou quelque chose du genre, parce que ce n'était pas vraiment le cas. Il n'avait pas envie qu'elle prenne peur. Il avait envie de sortir un peu avec elle avant que leur relation termine, quand même. Jordan regarda la jeune femme un moment. Elle releva alors les yeux avant de l'observer à son tour.

- Je suppose que c'est mon subconscient qui me rappelle que je ne te connais pas vraiment, dit-elle alors, expliquant pourquoi elle avait perdu le contrôle de son pouvoir.

Elle alla récupérer son micro, puis elle se tourna vers lui avant d'ajouter:

- Mais je suis intéressée à apprendre à mieux te connaitre, si tu veux bien.

Jordan se raidit. Pourquoi voulait-elle apprendre à le connaitre maintenant? La plupart des filles qu'il draguait ne lui parlait pas de cela avant quelques soirées avec lui. De toute façon, Jordan ne restait pas assez longtemps avec elles pour qu'elles apprennent à le connaitre, puisqu'il n'avait pas envie de parler de sa vie ou de sa famille à qui que ce soit. Le jeune homme remarqua qu'Élana avait rougi un peu plus, mais qu'elle le regardait tout de même sans broncher. Jordan comprit qu'elle était gênée de lui demander cela, mais qu'elle y tenait. Et qui sait, peut-être qu'elle ne le lâcherait pas tant qu'il ne lui aurait pas appris quelque chose sur lui? Il allait devoir lui apprendre quelque chose sur lui avant qu'elle commence à poser trop de questions auxquelles il n'aurait pas envie de répondre. Mais qu'est-ce qui pourrait satisfaire sa curiosité?

La jeune femme le sortit de ses pensées en lui disant qu'ils pouvaient encore chanter ensemble, puisque c'était leur passion commune et que c'était un bon début pour apprendre à se connaître. Elle lui sourit et Jordan sourit à son tour, quelque peu soulagé. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il parle de lui alors. Elle voulait juste savoir quelles chansons il connaissait. Dans ce cas, Jordan n'aurait aucun problème : les chansons permettent de se révéler, sans le faire complètement. Elles laissent des parts d'ombre, d'incertitude, et cela convenait parfaitement à Jordan.

- D'accord, dit-il, ses lèvres s'étirant en un beau sourire.

Il passa sa main dans ses cheveux et ajouta:

- Laisse-moi juste réfléchir à ce que je veux jouer.

Il passa à côté d'elle, sa main effleurant volontairement celle d'Élana. Il regarda l'écran de son iPod, cherchant une chanson qu'il aurait envie de jouer. Il regarda quelques titres, puis tomba sur You Give Love A Bad Name de Bon Jovi. Il sourit. Il avait envie d'une chanson énergique sans être trop joyeuse ou trop sombre, et celle-ci était parfaite. Il brancha son iPod et la chanson commença. Il alla chercher sa guitare et commença à en jouer et à chanter lorsque le premier couplet commença. Il regarda Élana du coin de l'oeil, se demandant si elle allait chanter.

Jordan parut se tendre lorsque je parlai d’apprendre à se connaître. Pourquoi? La réponse était pourtant évidente. Qui avait envie de confier son passé à une inconnue? Même moi, je n’avais pas envie de répondre aux questions qu’il pourrait me poser. J’avais depuis longtemps fait la paix avec le décès de ma mère, que je sois désormais seule au monde. Pourtant, la blessure était toujours là. Elle ne disparaîtrait sans doute jamais complètement. Comme moi, Jordan devait avoir un passé qu’il n’avait pas envie d’étaler au premier venu. Je le comprenais très bien.

Il se détendit et me sourit en comprenant que je parlais de musique. Il acquiesça, un sourire étirant ses lèvres. Je les regardais un moment, sentant encore le fantôme de leur caresse sur ma bouche. Il passa une main dans ses cheveux blonds, les décoiffant un peu plus, avant de me demander de le laisser réfléchir à ce qu’il voulait jouer. Oh, il allait jouer? Je me sentis un peu ridicule de ne pas savoir jouer du moindre instrument, alors qu’il pouvait sans doute jouer la majorité des chansons qu’il connaissait. Moi, je ne pouvais que chanter.

Il passa près de moi effleurant légèrement ma main qui ne tenait pas le micro. Je ne pus m’empêcher de frémir. J’étais convaincue qu’il l’avait fait volontairement. Il attrapa son iPod et chercha la chanson qu’il voulait jouer. Il fit défiler les titres et sembla faire son choix. Il connecta son iPod au système de son et elle reconnut aussitôt You Give Love a Bad Name. Jordan prit sa guitare pour jouer et commença à chanter. Je me joignis presque aussitôt à lui. La barrière de timidité qui m’avait entouré toute ma vie avait cédé, mais je savais que ce n’était qu’avec lui. Je savais que j’aurais encore énormément de mal à chanter en sachant que quelqu’un d’autre m’écoutait. Avant lui, Fynn et ma mère avait été les seuls à m’entendre chanter.

Je chantai de pair avec lui tout au long de la chanson, sans hésiter sur les paroles que je connaissais bien. J’étais fière de moi de réussir à chanter avec mon cœur malgré ma gêne, malgré la plupart des chansons de Bon Jovi étaient légèrement en dehors de ma zone de confort. J’allais choisir la prochaine, et j’allais le sortir aussi de sa zone de confort à mon tour. En regardant les chansons qu’il avait choisi, je me doutais un peu de ce qu’il aimait et ce qu’il aimait moins chanter. Nous étions à peu près dans les mêmes zones, à quelques nuances près. J’aimais beaucoup les chansons douces, un peu mélancolique. Il préférait la musique rythmée, mais dans des tons de rock. Je savais déjà quelle serait la prochaine.

- Shot through the heart, And you're to blame, You give love a bad name, I play my part, And you play your game, You give love a bad name

La chanson finit, je me retournai vers Jordan en lui souriant, un peu essoufflée.

- C’était génial, lui dis-je. À mon tour, si tu permets.

J’attendis un moment pour son accord, mais j’avais déjà commencé à chercher dans ma liste de musique pour la prochaine chanson. Je relevai le regard et lui sourit.

- Tu m’avais demandé si je ne chantais que des chansons tristes, et je t’ai dit non. Voici la preuve.

Je débranchai son iPod pour brancher le mien et appuyai sur play. Aussitôt, les notes de la chanson Troublemaker d’Olly Murs et Flo Rida commença. J’étais convaincue qu’il la connaissait, puisqu’elle avait été sur les ondes un moment. Et j’étais également convaincue que Jordan n’avait pas l’habitude de donner dans le pop. Le fixant d’un regard qui le mettait au défi de chanter, je me lançai sur les paroles et le rythme familier de la chanson.

Jordan n'avait pas attendu longtemps qu'Élana chante avec lui, puisqu'elle avait commencé à peine quelques instants plus tard que lui. Elle ne semblait plus aussi gênée que plus tôt, ce qui était bien. Cependant, la chanson ne semblait pas faire partie de son registre de voix. Elle chantait bien, mais c'était évident pour le jeune homme que sa voix se prêtait moins bien à cette chanson qu'à d'autres.

La chanson finit et Élana lui offrit un sourire. Elle semblait essoufflée. Jordan lui sourit aussi.

- C'était génial, lui dit-elle. À mon tour, si tu permets.

Jordan hocha la tête. Il se demandait bien ce qu'elle allait choisir comme chanson. Elle chercha un moment dans son iPod, puis elle releva la tête, un sourire aux lèvres.

- Tu m'avais demandé si je ne chantais que des chansons tristes, et je t'ai dit non. Voici la preuve.

Elle brancha son iPod et Jordan fronça les sourcils aux premières notes de la chanson. Il regarda Élana avec un regard interrogatif et elle le fixa avec un air de défi. Elle commença à chanter et le jeune homme reconnu la chanson : Troublemaker, une chanson qui avait joué fréquemment à la radio. Elle voulait vraiment qu'il chante ça? Il passa sa main dans ses cheveux. Non, c'était une blague. Pourtant, Élana continuait de chanter. Jordan déposa sa guitare sur une table et revient vers son micro. Il chercha les paroles sur internet. Il connaissait la chanson, mais il ne parvenait pas à se rappeler toutes les paroles. Il commença à chanter au moment du deuxième refrain, alors qu'il se répétait. Les paroles s'affichèrent avant la fin du refrain et Jordan chanta le rap, même si ce n'était pas trop son style, quoiqu'il n'était pas mauvais non plus.

- Maybe I'm insane/ 'Cause I keep doing the same damn thing/ Thinking one day we gon' change/ But you know just how to work that back/ And make me forget my name/ What the hell you do I won't remember/ I'll be gone until November/ And you'll show up again next summer, yeah!/ Typical middle name is Prada/ Fit you like a glove, girl/ I'm sick of the drama/ You're a troublemaker/ But damn girl it's like I love the trouble/ And I can't even explain why

Il chanta le refrain qui suivi en rangeant son iPod dans sa poche arrière droite. Il avança vers Élana, dansant presque, et fit des grimaces tout en chantant, se moquant visiblement des paroles. La chanson finit et il secoua la tête.

- Seriously? dit-il en regardant Élana, un sourire aux lèvres. Il fallait que tu fasse jouer cette chanson? Je n'arrive pas à la chanter avec sérieux.

Il rit un peu, puis il dit:

- Au moins, elle a du rythme.

Alors que je chantais, je ne pus retenir un petit sourire amusé en voyant l'air exaspéré de Jordan. Il passa une main dans ses cheveux, puis alla poser sa guitare et revint vers le micro en fouillant je-ne-savais-quoi dans son iPod. Je crus un moment qu’il ne chanterait pas du tout, mais je continuais malgré cela.

Puis, le deuxième refrain commença et Jordan se joignit à moi, les yeux rivés sur son écran. Je compris alors qu’il ne devait pas connaître les paroles. C’était normal. Je connaissais les paroles de Bon Jovi parce que j’avais traversé une passe, à douze ans, où j’étais « tombée amoureuse » du groupe.

J’avais retenu les paroles, mais les seules chansons que je chantais encore étaient généralement Bed of Roses ou Always, qui rejoignais un peu mieux ma voix que les autres. Mais je me doutais que Jordan n’avait pas connu de phase « pop » depuis Trouble Maker. Peut-être avant, par contre.

Il entama la partie de rap de la chanson avec brio. Cette partie était difficile pour moi, mais je la connaissais par cœur. Elle ne me correspondait pas vraiment, mais j’aimais bien la chanson en soi, et cette partie ne me dérangeait pas. Je fus vaguement surprise qu’il ne bute pas sur les mots, mais il semblait très à l’aise avec l’anglais. Trop pour faire ce genre d’erreurs.

Lorsque le refrain recommença, il rangea son iPod et s’approcha en dansant presque, ponctuant les paroles de grimaces. Je dus faire appel à tout mon self control pour ne pas rire et finir la chanson. Une fois fini, j’appuyais sur pause pour empêcher la prochaine chanson alors que Jordan secouait la tête.

- Seriously? dit-il.

Il ajouta qu’il était incapable de chanter cette chanson avec sérieux. Je ne pus m’empêcher de rire un peu avec lui. J’avais remarqué. Il ajouta qu’au moins, elle avait du rythme.

- C’est pour ça que je l’aime, répondis-je. Enfin, c’est loin d’être ma chanson préférée, mais i est vrai que je l’aime bien. Elle me fait un peu penser à ces garçons qui sont avec des filles totalement timbrées et qui retournent toujours vers elles, ajoutai-je en riant.

Je songeai alors que mon commentaire était peut-être déplacé. Après tout, je ne connaissais rien du passé de Jordan, et peut-être avait-ce été son cas. Je m’efforçai de ne pas laisser paraître mon trouble et lui sourit simplement.

- Est-ce que tu veux continuer? À chanter, je veux dire.

[HJ: C'est un peu court, sorry]